C'est assez

LES PASANTES DES QUATRE SAISONS : un roman autobiographique ?

J’avoue. J’ai vécu une année à Strasbourg dans les années soixante où j’étais en quelque sorte « étudiant ». Mais Frédéric ? (un petit clin d’oeil à Flaubert) : ce Parsifal qui reste muet en regardant passer le Graal. N’auriez-vous pas envie parfois de lui botter les fesses ? Et comme je ne suis pas masochiste…

Et les autres, me direz-vous, les « Passantes, existent-elles ? Bien sûr, dans le roman. Sigrün par exemple. Je ne me souviens plus de son visage, seulement de ce prénom exotique que je lui ai emprunté. Mais, elle ne devait pas ressembler à Louise Brooks ! Cependant j’ai bien connu une fille qui allait voler de nuit, des tulipes dans les massifs de la place Brandt, mais même s’il y a prescription, je ne la dénoncerai pas.

La rencontre entre Gérard de Nerval et Leny Escudéro a donné Sylvie, l’imagination a fait le reste.

Dans une première version, elles étaient deux, Isabelle et Christine. Comme la première disparaissait après le premier chapitre : « La ballade à Sylvie », j’ai fusionné les deux personnages pour n’en faire plus qu’une : Christine.

Avec Madeleine, c’est un peu différent. Elle n‘était pas prévue au casting. Puis en cours d’écriture est apparue la nécessité d’un personnage qui aurait dû s’appeler Odile. Au dernier moment j’ai réservé ce prénom, en souvenir d’une tante conviviale, à la tenancière du milkbar de la place de la cathédrale dont m’avait parlé Madeleine, avec qui, je parlais souvent de Strasbourg, où elle avait vécu, mais des années après moi. Par conséquent, elle ne peut-être la quatrième Passante, même si elle est aussi alsacienne que bretonne. ( bonjour Madeleine de Nantes !) De plus, Madeleine m’a permis de prolonger le roman qui, initialement, devait se terminer avec les « Nuits de juin ».

Dans les « Passantes », les lieux sont souvent évoqués avec précision, les restaurants, les troquets. Depuis, ils ont souvent changé de nom, mais le Montmartre est toujours là, bien qu’il n’ait jamais fait PMU. Quant à l’appartement de la rue des Frères, il a existé aussi, mais n’a jamais servi de camp de base pour attaquer le consulat des USA. André ou Lucien ne me contrediront pas.

Avant de me lancer dans la rédaction des « Passantes », j’avais fait une tournée de repérage à Strasbourg. En plein février, avec un vent à décorner les boeufs. J’étais entré dans un bureau de tabac de la rue du Vieux Marché aux Poissons pour me ravitailler en cigarillos. Depuis, j’ai cessé de fumer, à l’époque, ce devait être des Davidoff… « Un vent pareil, on dit ici que c’est le Bon Dieu qui court après le Diable pour le faire entrer dans la cathédrale, me raconta le buraliste ! » Cette anecdote ne tomba pas dans l’oreille d’un sourd et je la mis dans la bouche d’Odile, par un autre après-midi venteux…

On jouait toujours l’oratorio de Noël à Saint-Guillaume, mais il n’y eut jamais de tempête de neige. Ce jour là, j’ai découvert le studio de Madeleine, mais je vous ne dirai pas où. Car à mesure que l’histoire progresse, les lieux deviennent imprécis. Les jeux de piste de Madeleine entraînent Frédéric dans un Strasbourg incertain, d’où émerge à la fin la mansarde de Christine. Jusqu’au dernier chapitre, où Strasbourg ne sera plus qu’un rêve